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le 27 août 2018

Hyperconsommation : La fin d’un règne ?

Une petite virée en chariot sous la lumière blafarde de votre hypermarché, un samedi après-midi, ça vous tente ? Pas vraiment ? Pourtant, il y a trente ans, la ballade au Leclerc était LA sortie familiale hebdomadaire et personne n’y trouvait à redire. Aujourd’hui, faire ses courses en grandes surfaces n’amuse plus grand monde. Même les enfants rechignent à prendre place sur le petit siège du chariot. La consommation change, nous changeons. Une chose est certaine : nous voulons rompre avec le modèle classique de l’hégémonie de la marque sur la masse. Qualité, utilité, durabilité, humanité et sens… le consommateur d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celui d’hier. Cela est particulièrement vrai dans le domaine de l’alimentation. D’ailleurs, qu’est-ce qui a vraiment changé dans notre façon de nous nourrir ? Mercedes Erra s’apprête à vous guider dans les méandres de notre consommation. Entre marques prêtes à tout pour séduire et consommateurs de plus en plus critiques, bienvenue dans un monde où tout change très vite, mais à quel prix ?

Une crise morale mondiale

Le chômage ? Sa faute. La perte du pouvoir d’achat ? Sa faute. L’explosion de la dette publique ? Encore sa faute. « La crise », comme on l’appelle, est responsable de bien des maux de nos sociétés actuelles. Huit ans après, nous en subissons encore les conséquences. Les différentes populations ont pris conscience qu’il ne s’agissait pas d’un simple cap, d’un mauvais moment à passer en serrant les dents. Non, il s’agit bien d’un phénomène inscrit dans la durée. Ce qui nous arrive n’est en aucun cas le fruit du hasard. Les Tendances banques, les multinationales, les politiques… tous ont leur part de responsabilité, mais les gens enragent aussi beaucoup contre… eux-mêmes. Il s’agit en effet d’une crise de valeurs, une crise sociale, mais également morale. Nous sommes tous responsables quelque part de ce que nous traversons aujourd’hui. L’état de la planète que nous laisserons à nos enfants dépend de noscomportements d’aujourd’hui, c’est une notion admise par tous. C’est d’ailleurs parce que nous sommes responsables que nous avons le pouvoir d’inverser la tendance.

Une consommation en mutation

Des politiques qui laissent sceptiques

Le changement par le haut ? De moins en moins crédible. Moins de 40 % des personnes interrogées par BETC dans le cadre de son baromètre annuel international font confiance à leurs gouvernements. 27 % seulement pensent que les gouvernements peuvent changer les choses, ce qui démontre un niveau de doute sur les décisions politiques extrêmement fort. Par contre, 80 % pensent qu’ils ont une responsabilité individuelle pour changer le monde, c’est d’autant plus vrai chez les jeunes (moins de 35 ans). Faire bouger les lignes commencerait donc chez chacun-e d’entre nous, par changer notre façon de consommer. Au-delà de la rupture, le rejet Nous ne traversons pas une époque de grande théorie, d’idéalisation extrême qui pourrait mener à une révolution. Les changements les plus durables arrivent aujourd’hui graduellement. Les actions « alternatives » se font doucement une place. La jeune génération vous dira que, pour elle, recycler est un geste citoyen plus fort que d’aller voter, que c’est plus utile. L’utilité, un mot définitivement dans l’air du temps ; plus qu’un mot, il s’agit d’ailleurs d’un nouveau courant de pensée qui prend de plus en plus d’ampleur. Les citoyens, les jeunes a fortiori, cherchent à s’améliorer, dans leur façon d’être et dans leur façon de vivre. La société est audelà de la rupture, nous sommes face à un véritable rejet : vivre de la même façon que la génération précédente est impossible et impensable. Mieux consommer est un sentiment partagé par 90 % des personnes interrogées dans le monde. Si quasiment « tout le monde » s’accorde sur ce principe, en pratique consommer mieux, ça veut dire quoi ?


Quand vous faites de la pub, les gens s’en fichent du pourquoi ou du comment vous faites ceci ou cela. Nous, publicitaires, ce n’est pas tant la relation aux marques qui nous passionne, c’est le comportement général des gens. Pourquoi ils retournent dans les centres-villes, pourquoi ils désertent les grandes surfaces… Pour modifier leur comportement, c’est très subtil, il faut d’abord comprendre comment ils vont, comment ils se sentent. Le système le plus intéressant pour avoir une vision globale du bien-être des individus, c’est notre analyse trimestrielle. Tous les trois mois, nous effectuons une étude mondiale sur 25 pays du monde. Nous posons des questions sur un thème (la relation avec le corps, l’argent, etc.) et cela nous donne une photo de ce qu’est le monde aujourd’hui. Après, nous comparons. Pour obtenir des tendances, nous nous intéressons à ce que nous appelons dans le jargon de la pub les prosummeurs, ce sont 20 % des consommateurs qui ont une influence dans des domaines variés. Ces personnes peuvent influencer les tendances et les comportements. En règle générale, le comportement des prosummeurs nous dit si la tendance observée va continuer ou s’arrêter. Si les prosummeurs sont plus nombreux que les consommateurs classiques, la tendance va continuer.

Quotation

Vivre à fond sans un rond

Des produits qui n’emballent plus grand monde

Une madeleine emballée individuellement, dans un lot de dix, le tout dans un troisième grand sachet « format familial », ça vous agace ? En tout cas, de plus en plus de consommateurs sont conscients des problématiques environnementales posées par ce suremballage et orientent leurs actes d’achats en conséquence.

Le supermarché ne fait plus recette

Il y a vingt ou trente ans, les publicités nous vendaient le supermarché comme le moment agréable de la semaine, voire comme la sortie en famille. Tous ces produits, ce choix, à portée de main, quel bonheur ! Stop. Aujourd’hui on ne va plus en famille au supermarché. Les consommateurs fuient de plus en plus ces zones commerciales qui ne sont plus synonymes de qualité. Dans l’agroalimentaire, la notion de santé est de plus en plus présente. Les différents scandales alimentaires mais surtout la montée en puissance de l’obésité dans de plus en plus de pays ont renforcé le lien entre santé et alimentation. L’état Une consommation en mutation de santé et l’état de bien-être des consommateurs est beaucoup plus lié à leur comportement alimentaire qu’auparavant. 70 % des gens interrogés par BETC sont plus informés des qualités nutritionnelles de ce qu’ils mangent qu’auparavant. Ce besoin de vérification découle d’une inquiétude grandissante quant à la qualité des produits consommés, notamment au supermarché. Aujourd’hui, la qualité pour le consommateur c’est le producteur. L’épicier du coin, le boucher, le poissonnier du marché… des travailleurs proches des produits qui reprennent lentement mais sûrement des parts de marché aux grandes surfaces.


Mes enfants, loin d’être dans le besoin, font les poubelles. Mon fils a fait sa cuisine entièrement avec de la récup’. Ce n’est pas un besoin, c’est un refus de quelque chose. Mes enfants ne parlent que d’argent : dépenser le moins possible tout en ayant les mêmes choses est devenu un défi quotidien. Chez moi, ils ne prennent plus le train, trop cher, ils prennent Blabla Car

Quotation

Génération plan B

Outre la recherche de qualité, l’une des autres mutations dans notre façon de consommer concerne la notion de possession. Avant cette crise, c’était la règle du « j’ai donc je suis ». On achetait tout et n’importe quoi, dont beaucoup de n’importe quoi. Cette façon de penser est aujourd’hui surannée. La nouvelle génération de consommateurs a conscience de cette surconsommation et souhaite changer, en qualité donc, mais pas seulement. Éviter l’inutile, se concentrer sur l’essentiel devient la nouvelle façon de consommer, à l’origine de l’économie du partage. De quoi ai-je besoin ? Cela vaut-il ce prix ? Vaisje en avoir une réelle utilité ? Toutes ces questions sont de plus en plus présentes dans la tête des consommateurs qui réfléchissent beaucoup à leurs achats. Cette génération sait qu’elle devra composer avec moins de moyens que celle de ses parents. Nous entrons dans l’ère du « Saving money ». Et pour économiser, il faut réutiliser et revendre. La revente fait dorénavant partie des conditions principales lors d’un achat. La notion de plaisir n’a cependant pas disparu, c’est l’aspect possession qui disparaît petit à petit, car il ne séduit plus. Pourquoi avoir une voiture si je peux l’emprunter ou aller sur Blabla, Car ? Pourquoi acheter une tondeuse si je peux emprunter ou louer celle du voisin ? Pourquoi payer une chambre d’hôtel un prix fou si je peux profiter d’un appartement Airbnb ? Les produits ne sont plus vus comme une fin en soi, mais comme faisant partie d’un parcours d’utilité et d’une éventuelle revente, car la motivation première est bien économique pour 73 % des personnes interrogées. Nous entrons dans un monde de croissance alternative qui permet de vivre bien, à sa façon, en partageant. Pour une personne interrogée sur deux, un retour en arrière est impossible.


La transparence n’est plus une option pour les marques, les gens fouinent, adorent savoir, comprendre, visiter les usines, etc.

Quotation

Donner du sens et de l’humanité à son panier

Les bons élèves sociaux et environnementaux

Les entreprises, pour 80 % du panel interrogé par BETC, ont une obligation de faire davantage que de maximiser leurs profits. Les marques les plus appréciées doivent donc bien évidemment proposer de bons produits, mais pas seulement. La façon dont leurs employés sont traités entre également en ligne de compte, tout comme le traitement réservé aux animaux s’il s’agit de nourriture. La transparence, la traçabilité, la proximité avec le lieu de production et le producteur, la protection de l’environnement, etc. sont de plus en plus scrutées. Il ne suffit plus de vendre un bon jambon à un prix abordable pour attirer le chaland. Il faut vendre un bon jambon, à un prix abordable, avec des cochons bien traités, dans une exploitation respectueuse de l’environnement et avec des salariés heureux de venir au travail. Les consommateurs achètent plus facilement aux bons élèves sociaux et environnementaux.

Des marques mécènes

Les consommateurs attendent également des marques qu’elles rendent une partie de leur profit à la société. La notion de mécénat est importante. Danone via son « Fonds pour l’Ecosystème » mène de nombreuses actions dans les pays les plus pauvres de notre planète. Selon l’ex-PDG Franck Ribout « Il est de l’intérêt même d’une entreprise de prendre soin de son environnement économique et social, en un mot de son écosystème.»

Gâchis parmentier

Sans être obligées de tout dire en permanence, les marques sont de plus en plus surveillées, épiées par les consommateurs. Tout se sait à une vitesse fulgurante depuis la révolution numérique. Les scandales ne sont sans doute pas plus nombreux qu’avant, sauf que maintenant tout le monde le sait, très vite. Pour les entreprises qui ont essuyé des scandales, comme Findus avec ses lasagnes au cheval ou Volskwagen et ses moteurs truqués, rien ne sert de faire l’autruche. Prendre ses responsabilités, expliquer au consommateur et tout faire pour repartir sur des bases de confiance sont les seuls remèdes qui permettent de se tirer de ces situations délicates, le mieux, bien sûr, étant de les éviter !

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Le prix de l’imaginaire

Vous pensez peut-être que l’imagination ne se monnaye pas ? Pourtant, dans le milieu de la publicité, votre imaginaire a bien un prix. L’imaginaire a bien plus d’importance que le réel et va guider l’acte d’achat, le rationnel n’existe quasiment pas. Les marques l’ont bien compris et elles sont de plus en plus nombreuses à jouer avec notre imagination dans leurs campagnes publicitaires. Prenons l’exemple des biscuits Michel et Augustin ou Bonne Maman : tout est fait pour que le consommateur pense que les biscuits sont faits à la main ou tout du moins de façon artisanale, et même si ce n’est pas tout à fait la réalité, le consommateur, une fois en confiance, s’en accommode, car son imaginaire sera toujours plus fort que sa rationalité.

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